C'est à Kinsarvik, à 30 km d'Eidfjord, au bord du fjord qui mène à Bergen, que nous sommes installés en attendant le grand rendez-vous du samedi 2 août 2014 : le Isklar Norseman Xtrem Triathlon. J'ai craqué pour ce triathlon aux distances Ironman en regardant les magnifiques vidéos sur youtube; et là, ben ça y est : j'y suis!
La veille du départ, nous allons sur place pour récupérer les dossards et s'imprégner de l'ambiance lors du breifing. Celui-ci débute justement par la vidéo 2013 qui met tout le monde dans l'ambiance. Puis une Norvégienne chante 2 morceaux locaux avant que le directeur de course nous explique les règles de la grande vadrouille du lendemain. On s'esquive à la suite, préférant s'isoler à Kinsarvik et boulotter comme à mon habitude une pizza locale en guise d'ultime vrai repas.
1h30 : Réveil de tout le staff assistance et de Lolo, après 2/3 heures de sommeil. Je n'ai pas très faim, je sirote un thé et grignotte un petit sandwich léger. Je suis bien, je me sens bien; serein, tout va bien. Je suis prêt physiquement et mentalement pour en découdre et faire le grand saut, un bon feeling m'envahit.
3h00 : Nous sommes sur place, le Ferry attend les triathlètes aux regards angoissés. Je pose mon vélo et le matos dans ma case 279; je prends dans mes bras ma dream team Adé et mes parents, et c'est parti pour une petite croisière sur le fjord.
C'est alors que j'ai le sentiment d'entrer à l'intérieur de la vidéo que j'avais vu 2 ans auparavant. Je ne suis plus spectateur, je suis acteur. Nous sommes tous posés de chaque côté du Ferry. J'échange tranquillement avec des français, Thierry Sache notamment, et Eddie l'ami Suisse. Une voix retentit du néant disant que le départ est imminent. Les athlètes se lèvent comme des robots et ajustent les tenues, ça sent le grand saut. Je suis aux côtés de Thierry, on s'encourage pour la course puis je me retrouve face à l'eau, il est 5h00.
Je ne me pose pas de questions et saute à l'eau. Mon corps s'enfonce et je sens l'eau entrer dans la combinaison et la cagoule, une petite barre frontale due au froid (16°) me fait réaliser que là, je suis bien dans le fjord. Puis je remonte doucement à la surface et aperçois le ligne de départ à 300 mètres vers la berge.
Ca y est, on y est, trop bon, je suis excité plus que angoissé. Le temps de me positionner et j'entends la trompette du bateau raisonnée; les bras des kayakistes se lèvent, le reste n'est que bouillons et battements de jambes.
Les fauves sont lâchés en direction d'Eidfjord. Plus qu'à rejoindre la berge, l'eau se refroidissant par les courants des rivières qui drainent l'eau fondue des glaciers. Je ne cesse de crawler en 2 temps, percevant du public sur la route longeant le fjord. Je ne sais pas où j'en suis, j'ai l'impression de voir beaucoup de monde devant, mais j'y crois, sans arrêts je crawl, je crawl, sans cesse pour ne rien regretter. On longe les pontons et je vois le dernier virage et la sortie sous l'arche d'arrivée. Je me lève et sens que je n'ai plus rien dans les cannes. Je titube, je suis un peu "pompette" ce qui correspond aux effets collatéraux de la nage en horizontal.
Je retrouve Adé qui m'aide à ôter la combinaison et à m'habiller. Comme je suis mouillé, les habits ne glissent pas, c'est un peu galère mais bon, ça c'est fait et Adé m'annonce que je suis sorti en 1h16. Wow, super content le lolo, ma limite haute était fixée à 1h15. Ca sent bon tout ça. Je pars, quelqu'un m'encourage, je tourne la tête et rentre quasiment dans.. ma mère. Rien de grave, place aux 180km de vélo et 3 200m de D+.
10 km pour se remettre en action, et la longue montée en direction du plateau commence. Je tourne les gambettes et la mobylette répond bien ce qui me permet de doubler bon nombre de triathlètes sur les 40 premiers km. Pour chaque tunnel, on a un passage secondaire qui le contourne pour les vélos sauf un ouvrage dans lequel nous sommes obligés de passer (2km sous le tunnel en file indienne avec interdiction de doubler). Bon feeling toujours et les premiers ravitaillements de mon assistance commencent et s'enchaînent. C'est un grand plaisir de voir Adé et mes parents qui doivent stresser car ce n'est pas évident de trouver des places, de se garer sans gênes sous peine de pénalités pour le triathlète, et de satisfaire mes envies parfois originales.
Il fait froid avec un bon vent contraire sur le plateau qui mène à Geilo, je suis bien, euphorique et tente de gérer cet enthousiasme débordant. La 2ème partie du vélo est composée de plusieurs cols. La météo norvégienne nous propose alors du brouillard et vers le sommet du fameux dernier Col aux pente à 10%, il commence à pleuvoir. Je me pose sur le côté et retrouve Thierry et son assistance. Je mets ma veste coupée et le gillet redevenu obligatoire. Je vois alors Adé qui me propose la veste au sommet, je ne la prends pas car la pluie n'est pas forte. "Un warriors" me dit Adé... YES!
Sauf que d'un coup une averse monumentale, froide s'abat sur nous. Vent, pluie... Le sentiment de passer à la machine à laver : Lavage/ Essorage. Je roule 7km sous cette pluie battante avant de retrouver Adé à 1 km de la descente qui me propose à nouveau la veste. Et cette fois, je l'accepte avec grand plaisir. Quelle douche froide! Encore merci pour avoir eu ce réflexe Adé. Tu parles d'un warrior;-).
Je commence à être bien crâmé au niveau de cannes, la descente est technique et certaines déformations de la chaussée peuvent nous envoyer dans le décor. Je fais attention et me fait dépasser par des golgothes que je ne peux pas suivre.
J'arrive au changement de section T2 en 7h27 soit 24 km/h de moyenne et retrouve Adé et mes parents hyper enthousiastes. Adé m'aide à me déshabiller car tout est mouillé et j'ai les pieds et les mains gélés. Elle m'arrache mon cuissard énergiquement, Wow!!! Je me dirige vers la sortie : pas de pénalités, c'est bon ça! Une personne de l'organisation m'annonce 138ème! Oh lalalala, je la sens bien cette histoire. FORZA lolo, Aya Aya (version norvégienne d'Allez).....
les 25 premiers km le long du lac se passent pas trop mal, mon objectif étant de courir tout du long. Je calme mes ardeurs d'entrée de jeu car je suis excité par l'annonce de mon classement et du coup j'ai tendance à m'enflammer. Mais je veux durer, va falloir être patient. J'apprendrais d'ailleurs que le 160ème est passé 20 minutes après moi au départ de la course à pied, ce qui n'est pas grand chose vu le "chantier" qu'il reste à parcourir. Ma moyenne sera donc de 10km/h sur cette section, c'est pas une performance, mais vu ce que j'ai dans les guibolles, je m'en contente. Je me fais un peu doubler mais je double aussi alors pour le moment tout va bien. En gros je suis passé de 12km/h à un petit 9 sur la fin. Mais au 20ème km, je sens que je commence à couïner, je ne me sens pas très bien, moins vaillant et je n'arrive plus à m'alimenter.
A partir de 25.5km, Adé peut me suivre à pied. Moi qui pensais pouvoir alterner course et marche, et bien c'est rapé, suis bien crâmé et je sais que je vais avoir un grand moment de solitude qu'Adé va tout faire pour me le faire oublier. Je sais également que cet état peut aller vers le mieux mais qu'il va falloir être patient.
Je commence à me faire doubler de plus en plus fréquemment, ça remonte de derrière et moi, j'ai envie de vomir. Je dis à Adé que je vais tenter de vomir. Elle me dit : "Hors de question, tu tiens comme ça jusqu'au cut off, après tu fais ce que tu veux". Elle ne me lâchera pas, et va tenir la baraque, excellente Adé!! Bravo à toi.
Ca y est! Je passe la barrière avec succès, enfin, le black t-shirt est dans la poche. Il ne reste plus qu'à terminer les 5km de route et 5 km de trail dans les pierres en direction du Gaustatauppen. Progressivement, je n'ai plus envie de rendre, je me suis refait la cerise et en profite pour boulotter une moitié de gâteau de riz et boire de l'eau pétillante et du Coca.
Mes parents et Adé sont aux anges, moi je plane complet et profite de tous ces moments car mon état de forme revient. Sans spécialement accélérer, je reprends bon nombre de coureurs, le pied montagnard reprenant le dessus naturellement. C'est trop beau, comme dans un rêve....
Je vois le sommet du Gaustatauppen lors d'une éclaircie avant que celui-ci ne disparaisse à nouveau sous la brume. Je croise de nombreuses personnes qui m'encourage, je sens tout le respect que le Norseman peut inspirer.
Et de marche en marche, dans le brouillard, l'arrivée apparait pour mettre fin à cette magnifique aventure en 15h14.
Je suis un "Norseman" in Black
GRAND MERCI à Adé pour son assistance de choc et à mes parents avec qui j'ai eu la joie de partager l'Aventure et la Norvège. Un GRAND MERCI à tous mes coach et compagnons d'entraînement ainsi qu'à mes supporters et à mes sponsors.
Et une spéciale pensée pour ma petite famille et Mélissa.
"Un pays qui te dépasse et dans lequel du te dépasseras"
Lolo in Black avec Adé
Ca s'arrose Tchin
Ca c'est fait! NORSEMAN .... NORSELOLO